Nouvelle piste originale pour un vaccin contre le sida chez les macaques

L’équipe de chercheurs dirigée par Jean-Marie Andrieu, professeur à l’Université Paris Descartes, et Louis Wei Lu de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), à Montpellier, ont montré que la suppression de l’activation des lymphocytes CD4 infectés par le virus de l’immunodéficience simienne chez le macaque (VIS) empêche la réplication du virus, protégeant ainsi le macaque de l’infection. Ces résultats étonnants pourraient conduire au développement d’un vaccin contre le sida. Ils viennent d’être publiés dans CELL Reports le 20 Décembre 2012.
L’approche des chercheurs est fondée sur l’observation que l’activation du lymphocyte CD4, cible du VIH chez l’homme et du virus de l’immunodéficience simienne (VIS) chez le macaque est nécessaire à la réplication initiale du rétrovirus, puis à sa dissémination dans l’organisme. Pour aboutir à ce résultat extraordinaire, les chercheurs ont développé un vaccin oral constitué du VIS inactivé qu’ils ont associé à une bactérie commensale[1] du tube digestif, le Lactobacillus plantarum, connue pour favoriser l’absence de réponse immune aussi appelée tolérance immunitaire.
Contre toute logique de vaccinologie classique, et à l’inverse de tous les vaccins antiviraux existant à ce jour chez l’homme ou l’animal, ce vaccin « tolérogénique »[2] oral et sans toxicité n’a généré ni anticorps ni lymphocytes cytotoxiques.
Par contre, ce vaccin a induit une population jusqu’alors inconnue de lymphocytes CD8 régulateurs non cytotoxiques et MHC-IB/E restreints, à l’origine d’une suppression spécifique de l’activation des lymphocytes CD4 infectés par le VIS. Cette suppression a interrompu le cycle réplicatif du virus dans le lymphocyte CD4, protégeant ainsi les macaques de l’infection. Sur 16 macaques vaccinés ayant reçu de fortes doses de deux souches différentes de VIS 3 à 14 mois plus tard par voie intrarectale, 15 ont été totalement protégés.
Comme le VIS, le VIH requiert l’activation du lymphocyte CD4 pour s’y multiplier. Les scientifiques espèrent que ce prototype de vaccin oral, une fois ces résultats contrôlés par des scientifiques indépendants, soit transférable à l’homme, chez lequel il devrait être essayé à titre prophylactique aussi bien que thérapeutique. Ce nouveau concept de vaccin tolérogénique pourrait aussi s’appliquer à de nombreux désordres immunologiques.
Source : Université Paris Descartes
[1] Bactérie qui vit aux dépens d’une autre sans lui causer de dommage.
[2] Qui induit une tolérance spécifique.