Après-cancer: 43 % des Français estiment la réinsertion professionnelle comme la principale difficulté

Chaque année, en France, près de 350 000 personnes sont touchées par un cancer. 100 000 d’entre elles travaillent. Une situation qui, avec le recul de l’âge de la retraite, risque d’être de plus en plus fréquente.
Selon le sondage VIAVOICE pour l’Institut Curie, la réinsertion dans le monde professionnel est pour 43 % des personnes interrogées1 la principale difficulté des personnes ayant été traitées pour un cancer. Viennent ensuite « la difficulté d’affronter le regard des autres » pour 24 % des Français, « un suivi médical lourd et une santé encore fragile » pour 18 % d’entre eux, « la reprise d’une vie sociale » pour 20 % et « les difficultés psychologiques, notamment liées à une crainte de rechute » pour 18 %.
Un double enjeu social et psychique
« Cette inquiétude des Français complète parfaitement les résultats de notre enquête2 sur les répercussions du cancer sur la vie professionnelle » déclare le Dr Bernard Asselain de l’Institut Curie. « Si 8 salariés sur 10 retravaillent après un cancer, la moitié d’entres eux disent rencontrer des difficultés » ajoute-t-il.
Fatigue, troubles de la mémoire et de la concentration, perte de l’estime de soi, de confiance liée à la peur de la récidive, autant d’obstacles et d’incertitudes pour réussir la réinsertion socio-professionnelle des personnes ayant été atteintes de cancer. Environ 20 % des salariés disent même avoir été pénalisés dans leur emploi à cause de leur maladie.
Le moment du retour au travail représente un double enjeu social et psychique. Le manque d’anticipation, le dialogue insuffisant avec le médecin du travail, l’incompréhension de la hiérarchie et des collègues semblent être les obstacles à lever en priorité. Comment ? Par la mise en place d’actions concertées entre les divers acteurs pour faciliter le passage du statut de malade à celui de personne de retour dans la vie.« Le patient et l’entreprise ne sont généralement pas prêts à ce retour au travail » complète Monique Sevellec, co-auteur de cette étude et psychosociologue à l’Institut Curie. Souvent par manque d’anticipation. « Dès le début de la prise en charge médicale, le cancérologue doit pouvoir avec le patient envisager le retour au travail et les conditions de celui-ci » explique Bernard Asselain.
Dans l’immédiat, pour sensibiliser les salariés sur les difficultés spécifiques que présente le retour dans la vie professionnelle, Bernard Asselain et Monique Sevellec envisagent la création d’un livret d’information reprenant l’expérience d’anciens patients, qui permettrait au salarié une meilleure anticipation de sa situation.
Première étape d’une série d’actions basées sur le dialogue et l’accompagnement personnalisé (formalisation des consultations de l’après-cancer, visite de pré-reprise professionnelle systématique, aménagements…) et impliquant tous les acteurs (salarié, médecin du travail, oncologue, médecin traitant, ressources humaines…).
 « Tout doit en effet être mis en oeuvre pour aider les patients à entrer dans l’après-cancer » explique le Dr Laure Copel, responsable de l’Unité mobile d’accompagnement et de soins continus de l’Institut Curie. Le Plan Cancer 2009-2013 a d’ailleurs fait de cette phase de reconstruction essentielle, l’un de ces axes prioritaires.
Une réalité dont sont conscients les Français puisque pour 86 % des personnes interrogées lors du sondage VIAVOICE pour l’Institut Curie, il est prioritaire de favoriser le retour à l’emploi des anciens malades, et 85 % estiment qu’il faut réduire les discriminations vis-à-vis des personnes ayant été traitées pour un cancer, pour l’obtention d’un prêt notamment.
Autre donnée intéressante selon ce même baromètre, 66 % des Français estiment qu’une personne ayant été traitée pour un cancer peut retrouver la même vie qu’avant. Une perception qui apparaît là en total décalage avec le ressenti des personnes ayant été malades, dont les propos évoquent souvent l’impossibilité d’un retour à l’avant.
A l’avenir, ce baromètre permettra de suivre l’évolution de l’opinion des Français sur l’aprèscancer. On considère qu’aujourd’hui, en France, au moins 2 millions de personnes vivent en ayant eu un jour un cancer et ayant fini leur traitement initial. « C’est un constat encourageant puisqu’on peut désormais parler de guérison, mais cela nécessite un plan d’actions, porté par tous les acteurs, pour faciliter la réinsertion socio-professionnelle des personnes touchées » conclut le Dr Laure Copel.
1 Sondage Viavoice réalisé pour l’Institut Curie. Interviews effectuées par téléphone les jeudi 3, vendredi 4 mars, jeudi 31 mars et vendredi 1er avril 2011. Échantillon de 1007 personnes (3 & 4 mars) et 1006 personnes (31 mars et 1er avril), représentatif de la population française de 18 ans et plus.
Source : Institut Curie